Aménagement d’un nouvel espace de vie et de travail pour le projet Iskweu
(French content only)
Trop de femmes autochtones disparues
La violence que subissent les femmes, les filles, les personnes trans et les personnes bispirituelles est généralisée dans l’histoire coloniale du Canada et est maintenant reconnue. Malgré les enquêtes et les commissions, il est impossible de dénombrer le nombre exact de femmes, de filles ainsi que de personnes trans et bispirituelles qui sont portées disparues ou assassinées. Malgré cela, il est facilement et tristement démontrable que le nombre de victimes est anormalement beaucoup plus élevé proportionnellement aux victimes de la population non autochtone.
Les conséquences d’un lourd passé colonial
En 2019 paraît L’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées. Cette étude se base sur près de 100 rapports existants, en plus de nombreuses rencontres effectuées avec les communautés. Les conclusions sont unanimes: « la violence contre les peuples autochtones – y compris les femmes et les filles autochtones – prenait racine dans la colonisation. Sans changement fondamental au rapport de force qui caractérise ce lien, cette relation demeure, aujourd’hui encore, empreinte d’une violence inhérente » Il est plus que temps de reconnaître ces faits, de poser les actions nécessaires pour permettre une guérison et de redonner la place et la voix des femmes et des peuples autochtones.
Le projet Iskweu
Le projet Iskweu est une initiative du Foyer des femmes autochtones de Montréal. Leur mission est de répondre à un besoin d’aide immédiat exprimé par les familles et les proches dans le cas d’une femme, d’une fille, d’une personne trangenre ou bispirituelle autochtone disparue. Plus largement, le projet vise à réduire et éventuellement éradiquer le nombre de disparitions et d’assassinats chez cette population au Québec.
Concrètement, Iskweu apporte un soutien affectif auprès des familles et des proches qui vivent cette épreuve difficile, et travaille activement en aval pour mettre en œuvre des stratégies de prévention. Iskweu s’assure également que la police offre une réponse adéquate aux victimes; qu’elle dépose un rapport, mène une enquête appropriée et qu’elle adopte des pratiques exemplaires tout au long des divers processus de prévention et de judiciarisation.
De l’intervention nomade vers un lieu sécuritaire
En décembre 2020, Janis Qavavauq-Bibeau, coordonatrice de recherche du projet Iskweu, rejoint ASFQ afin qu’une équipe dédiée de professionnels en aménagement les accompagne dans l’installation de leur premier local. Depuis la création du projet en 2017, les intervenantes n’ont pas d’espace désigné et doivent faire leurs rencontres dans des endroits informels comme des cafés ou des lieux extérieurs. Un nouveau local leur permettra d’accueillir les femmes, les familles et les proches des victimes dans un endroit convivial et sécuritaire afin de leur apporter tout le soutien nécessaire.
Concevoir et construire, entre femmes!
En janvier 2021, ASFQ visite le local convoité avec Janis Qavavauq-Bibeau. Ensemble, l’équipe identifie les travaux prioritaires à mettre en oeuvre par le propriétaire avant de louer et d’aménager les lieux. Un mur est retiré pour donner un endroit ouvert et lumineux. Un nouveau plancher est posé, et le choix de peinture donne rapidement le ton sur le potentiel du lieu. C’est également durant cette période que l’équipe interne d’ASFQ oeuvre en parallèle à la conception de l’aménagement de l’espace.
C’est le mois suivant, en février, que ASFQ réalise la construction avec l’aide précieuse de dix bénévoles professionnels et étudiants provenant des domaines de l’architecture et du design. Il est essentiel de mentionner que ce projet a été piloté, conçu et construit en presque totalité par des femmes! Durant deux semaines, les membres de l’équipe multidisciplinaire ont mis leurs compétences en commun afin d’offrir un local non seulement adéquat mais accueillant à la communauté et aux usagères du projet.
Design et réemploi
L’équipe d’ASFQ souhaitait réaliser un endroit accueillant en utilisant le plus possible des matériaux de seconde main afin de créer un espace en synergie avec les valeurs communautaires, environnementales, et d’économie circulaire de l’organisme. Les cloisons de l’espace ont été conçues en fonction d’éléments architecturaux choisis en amont du design. Près d’une dizaine de portes pleines et vitrées ont ainsi étés récupérées. La majorité de ces matériaux provient de la boutique Éco-Réno, entreprise partenaire de ASFQ.
Inauguration durant l’été 2021
Un bureau vitré permet aux travailleuses de se retirer momentanément, tout en gardant accès à la belle lumière du jour et en restant disponible visuellement. Cet espace permet également aux intervenantes de faire des consultations en retrait pour conserver la privacité des usagères. Un espace cuisinette est également mis à la disposition de toutes pour se rassembler ou casser la croûte. Globalement, le design convivial et chaleureux permet aux usagères de se reposer et de se sentir confortables pour partager leurs situations souvent difficiles.s
Avancement du projet
L’équipe d’ASFQ tient à remercier les porteuses du projet Iskweu pour le travail essentiel de prévention et de soutien qu’elles offrent auprès des femmes, filles et personnes trans ou bispirituelles autochtones à Montréal.
Depuis la création du projet Iskweu en 2017, nous avons constaté le besoin d’un espace où les femmes qui sont victimes de violences pourraient retrouver un sentiment de sécurité. Avec le travail d’architecte sans frontières à Résilience Montréal, j’avais pensé qu’ils pourraient avec leurs expertises créer un espace sécuritaire. L’équipe composée de bénévoles ont su exactement comment créer un bureau qui répond aux besoins des femmes qui ont besoin de nos services.
J’ai eu le privilège de participer à la construction d’un espace clé pour le projet Iskweu. En tant que jeune architecte, ce projet m’a offert l’opportunité de participer à la matérialisation des plans. L’explication par l’une des responsables du projet sur l’effet du design du local pour le bien-être de la communauté a été l’un des moments marquants du projet. Redécouvrir cet espace à travers leurs yeux a certainement enrichi ma vision de l’architecture.
Bénévoles: Anissa Colasante, Antoine B. de Géry, Catherine Juneau, Daniela Gomez, Emmanuelle Page, Fanny Lorchat, Florence Parent-Beaudin, Marie-Joëlle Larin-Lampron, Sheila Lanthier, Simone Mauro